Les Jardins d’Étretat attirent plus de 100 000 visiteurs par an
Conçu par l’architecte paysagiste russe Alexandre Grivko, le premier jardin expérimental ouvert au public célèbre la Normandie au travers de sa végétation, ses vagues et ses falaises.
À l'aplomb d'une mouette en vol, le tableau fait un hectare et demi. Car Les Jardins d'Étretat sont bien une œuvre végétale imaginée par le Russe Alexandre Grivko à la pointe de la falaise avec vue sur la célèbre aiguille et son arche. Autour de la villa baptisée « Roxelane » par la comédienne parisienne Madame Thébault à la fin du XIXe siècle — où tout le gratin économique, politique et surtout artistique de l'époque, dont Claude Monet, s'est invité à l'avènement du tourisme —, l'architecte paysagiste a créé le premier jardin expérimental ouvert au public.
Un laboratoire botanique et artistique
Arrivé en France voilà huit ans, Alexandre Grivko, amoureux de la Côte d'Albâtre, achète en 2014 la propriété à une famille d'architectes présents depuis soixante-dix ans. Immédiatement, avec son entreprise Île Nature qui conçoit des jardins dans le monde entier comme dernièrement à Venise et en Suisse, il entre en discussion avec la mairie pour acquérir la parcelle de chênes attenante, mais « pas facile à planter à cause d'une terre pleine de silex, des vents dominants et de l'air marin, explique Daria Ermakova-Bernot, chargée de communication. Pour ce coup de foudre, poursuit-elle, il avait déjà en tête ses jardins. Mis noir sur blanc dans ses carnets, c'est devenu, depuis, sa carte de visite internationale et le 2e monument référencé dans TripAdvisor après la pointe d'Étretat ».
À partir de 2015, pendant deux ans de travaux et avec l'apport de centaines de tonnes de terre, les jardiniers se sont activés selon la méthode de Le Nôtre, le Maître de Versailles : « Employer une quantité limitée d'espèces végétales majoritairement locales, révèle Daria Ermakova-Bernot. Il y a près d'une centaine de variétés, mais peu de fleurs. C'est pour cela que les touristes surnomment les jardins Cinquante nuances de verts. Ensuite, tout au long de l'année, les trois jardiniers réalisent des tailles minutieuses pour jouer avec les formes. Au final, ce n'est pas un jardin botanique, mais une immense sculpture végétale ! »
Le miroir de la nature normande
Ainsi, pour sa résidence secondaire, Alexandre Grivko ne livre pas un, mais six jardins nommés Avatar, Impressions, Émotions, Aval, Zen et Amont : « Ils représentent les tourbillons des courants marins, les falaises, l'Aiguille d'Étretat, la ferme ostréicole de Marie-Antoinette et la Manche grâce à des feuilles vertes et argentées. Avec le vent, l'écume des vagues se forme. C'est un endroit poétique », s'enthousiasme la communicante.
Des jardins qui permettent aussi de réfléchir, s'isoler, prendre racine ou encore admirer des dizaines d'œuvres grâce à une collection permanente dont la plus emblématique œuvre est la série « Gouttes de pluie » de l'espagnol Samuel Salcedo. Dans une clairière, la plus surprenante est celle du sculpteur russe Serguey Katran avec, accrochées aux arbres, les représentations des ondes acoustiques du mot « art » dans 125 langues dont des langues mortes. Chaque année, sauf 2020 à cause de la crise sanitaire, les Jardins d'Étretat reçoivent aussi une exposition temporaire dont un des premiers artistes français invités fut le sculpteur normand, Jean-Marc Depas.
Entrées gratuites pour le personnel soignant
En 2017, la volonté de l'architecte paysagiste a été d'ouvrir au public cette création végétale. Et, le public a répondu présent. En 2019, près de 100 000 entrées payantes ont été enregistrées dont 30 % d'étrangers. « Depuis juillet, c'est pour nous une grande surprise ! Nous doublons le nombre de visiteurs et quasiment que des Français, complète Daria Ermakova-Bernot. C'est pour cela, que nous envisageons pour la prochaine saison de fournir des audioguides pour accompagner nos promeneurs dans ces jardins futuristes. »
Pour cette année exceptionnelle, car, il a été touché par une longue maladie aujourd'hui en rémission, Alexandre Grivko n'a pas oublié le personnel soignant qui s'est tant engagé dans la lutte contre la Covid-19. Ainsi, jusqu'à la fin 2020, sur présentation d'un justificatif, l'entrée est gratuite pour l'ensemble du corps médical.